Si vous n'avez pris aucune mesure préalable relative au partage de votre succession, les règles de la succession légale sont applicables. Ces règles déterminent les personnes aptes à succéder, l'ordre de succession et les modalités de partage de la succession. Au sein de l'Union européenne, c'est le droit successoral de votre dernière résidence habituelle1 qui est applicable.
Qu'est-ce que la planification successorale?
La planification successorale vous permet d'entreprendre des démarches de votre vivant pour transmettre votre patrimoine selon vos souhaits personnels. Anticiper votre succession vous permet de:
- Protéger ou avantager certains proches
- Transmettre (une partie de) votre patrimoine à des personnes autres que vos héritiers légaux
- Alléger les droits de succession dont vos héritiers sont redevables
- Anticiper l'héritage en procédant à des transmissions de patrimoine avant votre décès
Nous abordons ici les dispositions juridiques et possibilités en termes de planification successorale en Belgique.
Forme de cohabitation déterminante
La forme de cohabitation que vous et votre partenaire avez choisie est essentielle pour définir ce dont le partenaire survivant héritera.
- Les cohabitants de fait n'ont pas le statut d'héritiers légaux.
- Les cohabitants légaux héritent de l'usufruit du logement familial et des meubles qui le garnissent mais pas du reste du patrimoine du défunt.
- Les conjoints mariés ont, quant à eux, le statut d'héritiers légaux et héritiers réservataires2, ce dont ils héritent dépendra de leur régime matrimonial.
Contrat de mariage
Le contrat de mariage peut constituer une piste de planification patrimoniale si vous souhaitez avantager votre conjoint. Grâce à un contrat de mariage, vous pouvez:
- Introduire certains biens propres dans le patrimoine commun.
- Stipuler que le conjoint survivant recevra plus que la moitié de la communauté à laquelle il a normalement droit. Vous pouvez même stipuler que le conjoint survivant recevra la totalité de la communauté en cas de décès. Il s'agit en l'occurence de la clause "au dernier vivant tous les biens", qui est toutefois fiscalement onéreuse.
- Introduire des "options" dans votre contrat de mariage. Ces clauses d'attribution alternative de communauté vous permettent par exemple de définir qu'au décès de son conjoint, le conjoint survivant peut choisir de recueillir tout ou une partie des biens communs en pleine propriété ou en usufruit seulement. L'avantage est que le conjoint survivant peut faire ce choix en fonction des circonstances concrètes au moment du décès: son âge et son état de santé, sa relation avec les enfants, etc.
Le contrat de mariage vous permet également de protéger les enfants d'une relation précédente.
Ces adaptations portent sur le partage du patrimoine au moment du décès. Certaines modifications peuvent entraîner une hausse des droits de succession. Il convient de tenir compte de tous les aspects au moment de prendre votre décision, et de vous faire conseiller par un notaire.
Testament
Un testament vous permet de léguer une partie de votre patrimoine à un bénéficiaire de votre choix. Vous devez cependant garder à l’esprit qu’il existe une partie réservée aux héritiers réservataires2.
Ce testament ne prendra effet qu'à votre décès, ce qui veut dire que les biens légués ne reviendront au(x) bénéficiaire(s) qu'au moment de votre décès. Un testament peut être révoqué à tout moment. Les bénéficiaires sont redevables de droits de succession sur ce qu'ils reçoivent dans le cadre du testament.
La donation est une convention entre deux parties: le donateur d'une part et le bénéficiaire (le donataire) qui accepte d'autre part. En général, une donation prend effet immédiatement. Par l'acceptation, la propriété du bien donné passe du patrimoine du donateur à celui du donataire. La donation est en principe irrévocable sauf dans certains cas.
Enfin, lorsqu'on procède à une donation, il faut également veiller à ce que la réserve de vos héritiers réservataires2 ne soit pas entamée. Si vous donnez plus que la quotité disponible, les héritiers réservataires peuvent exiger que cet excédent retourne dans la succession.
En tant que grand-parent, vous pouvez faire une donation directement à votre petit-enfant. Cette donation est imputée à l’héritage de votre enfant (à condition que le donateur, l’enfant et le petit-enfant aient donné leur accord). C’est ce qu’on appelle le saut de génération lors d’une donation.
Par l’intermédiaire d’un pacte successoral global, vous pouvez, sous certaines conditions et dans une certaine mesure, vous mettre d’accord avec vos enfants sur des donations. Cela peut être utile pour déterminer l’équilibre entre les héritiers en ligne directe: vous pouvez par exemple décider que l’un de vos enfants devra quelque chose à un autre enfant. Un tel pacte successoral peut uniquement être dressé par un notaire.
Dans la pratique, la donation est souvent réalisée avec réserve d'usufruit. Le donateur conserve ainsi l'usufruit (p.ex. les intérêts, les revenus locatifs) du bien transmis par donation tout au long de sa vie et garde par ailleurs le contrôle dudit bien (le donataire ne peut disposer seul du bien).
Donation de biens immeubles
Si vous souhaitez faire donation d'un bien immeuble, vous devez impérativement vous rendre chez le notaire. L'acte de donation est alors enregistré et vous payez des droits de donation. Dans les trois régions, les droits de donation sur les donations de biens immeubles ont été récemment revus à la baisse.
Donation de biens meubles
Les donations de biens meubles peuvent être réalisées de différentes manières.
1. Devant un notaire belge ou étranger
L'acte est alors obligatoirement enregistré par le notaire et donnera lieu au paiement de droits de donation. Il n'y aura dès lors plus de droits de succession à payer au moment du décès du donateur.
2. Par un don bancaire
Un don bancaire est un versement scriptural de fonds et/ou de titres entre comptes à titre de donation. Afin de pouvoir prouver le don bancaire, un pacte adjoint attestant qu’il s’agit d’une donation est nécessaire.
Vous ne payez pas de droits de donation. Les biens donnés ne sont soumis aux droits de succession qu'en cas de décès du donateur dans les 3 ans (en Région flamande et bruxelloise) ou 5 ans (donations à partir du 1er janvier 2022 en Région wallonne) qui suivent la donation.
Si vous faites enregistrer les documents accompagnants le don bancaire, des droits de donation sont dûs. Il n'y aura dès lors plus de droits de succession à payer au moment du décès du donateur.
Assurance vie
Avec une assurance vie, vous pouvez favoriser quelqu’un lors de votre décès ou au cours de votre vie. Vous pouvez par exemple attribuer une partie de votre patrimoine, via une assurance-vie, à vos petits-enfants. Le tarif des droits de succession en ligne directe s'appliquera et cette attribution permet de répartir votre patrimoine sur plusieurs têtes, ce qui permet de diminuer le montant global des droits de succession.
Vous devez cependant garder à l’esprit qu’il existe une partie réservée aux héritiers réservataires2. Si vous disposez dans votre assurance vie de plus que la quotité disponible, les héritiers réservataires peuvent exiger que cet excédent retourne dans la succession.
Lorsque l'événement assuré se produit (votre décès ou l'échéance du contrat d'assurance), la compagnie d'assurances verse un capital au bénéficiaire contractuel. Tant que l'événement assuré ne se produit pas, vous pouvez en principe toujours racheter une assurance vie ou modifier le bénéficiaire.
L'attribution bénéficiaire contractuelle avec assurance vie est prioritaire sur les dispositions du contrat de mariage et sur les dispositions testamentaires. En vertu de cette clause d'attribution bénéficiaire, la prestation est attribuée directement - c'est-à-dire en dehors de la succession - au(x) bénéficiaire(s). Le preneur d’assurance peut aussi, désigner la "succession" comme bénéficiaire. Dans ce cas, la prestation d'assurance sera attribuée conformément aux règles de la dévolution légale et sera soumise aux droits de succession.
La planification successorale par le biais d'assurances vie s'opère aussi bien avec des assurances épargne à rendement garanti (branche 21) qu'avec des assurances placement liées à des fonds de placement (branche 23).
Le preneur3 de la police d'assurance devra de préférence être la même personne que l'assuré4 afin d'éviter que l'assurance ne reste bloquée au décès du preneur d'assurance tant que l'assuré est encore en vie.
Clause de tontine ou d'accroissement
Vous pouvez vous avantager mutuellement en tant que conjoints cohabitants non mariés grâce à la clause de tontine ou d'accroissement. Demandez conseil à un professionnel.
1 Cette règle s'applique à tous les pays de l'Union européenne, à l'exception du Danemark, du Royaume-Uni et de l'Irlande.
2 Les héritiers réservataires sont les descendants et le conjoint survivant. Ils ont au minimum droit à une certaine quotité de votre succession, appelée la réserve, dont on ne peut les priver par des dispositions telles que, par exemple, des donations à des héritiers non réservataires, un testament ou la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie. La réserve des enfants équivaut globalement à la moitié de la succession (indépendamment du nombre d’enfants). La réserve du conjoint survivant quant à elle est constituée de l’usufruit sur la moitié de la succession ou d’au moins l’usufruit sur l’habitation familiale et les meubles meublants.
3 La personne qui souscrit la police et paie les primes.
4 Une assurance vie est conclue sur la vie de l'assuré. Le fait qu'il décède en cours de contrat ou qu’il soit en vie à l'échéance détermine si l'assureur est tenu à la prestation et à quel moment il doit la verser.