Planification de succession avec votre art
Si vous possédez des œuvres d'art ou si vous vous pouvez vous targuer d’être l'heureux propriétaire d'une collection d'œuvres d'art, vous vous demandez peut-être parfois ce qu'il peut ou va en advenir après votre décès. La collection sera-t-elle partagée ? Pouvez-vous la léguer à un seul enfant ? Vos héritiers peuvent-ils payer les droits de succession sur ces œuvres d’art sans pour autant devoir les vendre ? Ou vaudrait-il mieux les transmettre de votre vivant ? Et, dans ce cas, pourrez-vous toujours jouir de votre collection ?
Vos options
Vous ne faites rien
Tant que vous vivez, vous faites ce que vous voulez de votre patrimoine. À votre décès, vos héritiers hériteront en principe de vos biens en indivision. Ils devront alors décider ensemble de ce qu'ils feront de votre patrimoine : le conserver, le vendre à un tiers, se racheter leurs parts réciproquement. Ils doivent payer des droits de succession sur ce dont ils héritent. En Région flamande, ces droits peuvent atteindre 27 % et 55 % selon le degré de parenté. Dans la région de Bruxelles-Capitale, le taux d'imposition va de 30 % jusqu’à 80 %.
Vous léguez le patrimoine par testament à un héritier déterminé
Vous voulez éviter que vos héritiers aient à gérer ensemble le patrimoine ? Ou vous voulez éviter que votre patrimoine soit disséminé ? Vous pouvez envisager de léguer votre collection d'art à un (ou plusieurs) d'entre eux par testament. L'inconvénient de cette solution est que vos héritiers devront toujours payer des droits de succession – souvent énormes - sur ce patrimoine.
Vous en faites don de votre vivant
Par le biais d'une donation de votre vivant, vous avez l’assurance que votre collection d'œuvres d'art reviendra à la personne de votre choix.
- Vous pouvez opter pour un don manuel, par lequel vous transmettez les biens en mains propres. Et vous confirmez dans une lettre que vous avez effectué à cette occasion une donation que le donataire accepte.
Si vous enregistrez cette donation, des droits de donation sont dus immédiatement. En Région flamande et dans la Région de Bruxelles-Capitale, un taux forfaitaire de 3 % est pratiqué en ligne directe (pour les partenaires et enfants) et de 7 % pour toutes les autres personnes.
Si vous ne procédez pas à l’enregistrement, vous courez un risque pendant trois ans. Si vous décédez pendant ce délai, les donateurs doivent déclarer le patrimoine dans votre succession et payer sur celui-ci des droits de succession beaucoup plus élevés. Si vous ne décédez qu’après trois ans, les œuvres d'art seront transmises en exonération de droits. - Vous pouvez également les donner par l'intermédiaire d'un notaire belge, auquel cas des droits de donation sont immédiatement exigibles.
Qu’en est-il si vous souhaitez continuer à disposer de votre patrimoine de votre vivant ?
Vous pouvez faire une donation avec réserve d'usufruit.
De cette façon, vous conservez :
- la jouissance (vos tableaux peuvent continuer à orner votre mur),
- le contrôle (par exemple, vous pouvez stipuler que les donataires ne peuvent pas vendre les pièces de la collection sans votre accord),
- la gestion et les revenus de (la collection de) vos œuvres d’art.
Si vous souhaitez faire une donation avec réserve d'usufruit, il est indispensable de passer par un notaire (pas par un don manuel).
Qu’en est-il si vous voulez éviter autant que possible de disperser votre collection ?
Dans ce cas, en plus de la donation (avec ou sans réserve d'usufruit), vous pouvez envisager aussi une structure de contrôle, comme la société de droit commun ou la fondation privée.
Si vous travaillez avec une société de droit commun, l'idée est que la collection d'art soit transmise à vos proches sans que vous en perdiez le contrôle. La société de droit commun est un instrument de contrôle très flexible et fiscalement transparent. Soit vous donnez le patrimoine (par don manuel ou par l'intermédiaire d'un notaire) et l’apportez ensuite dans la société de bien commun avec les donataires, soit vous constituez d'abord la société de droit commun et donnez ensuite les parties de celle-ci (uniquement par l'intermédiaire d'un notaire). La constitution n’impose pas de passer chez le notaire, elle peut se faire sous seing privé. Dans les statuts, vous pouvez vous désigner comme gérant statutaire (quasi-)inamovible et déterminer qui prendra votre suite à ce poste lorsque vous ne serez plus en mesure de le faire vous-même (p. ex., en cas de décès ou pour toute autre raison). Certaines formalités doivent toutefois être prises en compte, notamment l’inscription à la BCE ou dans le registre des bénéficiaires effectifs, une assemblée générale annuelle, etc. Une société de droit commun prendra souvent fin au décès du donateur/fondateur.
Dans le cas d'une fondation privée, la collection d'art est apportée dans la fondation, en réalisation d'un objectif désintéressé, tel que, par exemple, « perpétuer la collection d'art sur plusieurs générations ». L’important est qu'une fondation privée ne peut pas accorder d'avantage matériel à ses fondateurs ou à son ou ses administrateurs. Si vous travaillez avec une fondation privée, le patrimoine va donc à la fondation et non (directement) à vos proches. Vous pouvez créer la fondation privée via un notaire de votre vivant ou dans votre testament. La fondation privée peut recevoir ce patrimoine de manière très avantageuse : en Région flamande, elle paiera 8,5 % de droits de succession sur un héritage et 5,5 % de droits de donation sur une donation. Dans la Région de Bruxelles-Capitale, une fondation privée paiera 25 % de droits de succession et 7 % de droits de donation (ou 0 % dans les deux Régions en cas d'un don manuel non enregistré si le donateur survit encore trois ans). Là encore, il s'agit de tarifs forfaitaires, donc quelle que soit la valeur de la collection. Attention toutefois que la fondation peut être soumise à certaines obligations fiscales. Renseignez-vous bien à l'avance.
Traitement (in)égal entre les enfants ?
Si vous léguez à un enfant votre collection d'art, par testament ou donation, alors que vous avez d'autres enfants, la loi part du principe que vous aviez l'intention de traiter vos enfants de la même manière (sauf disposition contraire). Les autres enfants ont alors droit à une valeur égale (du reste) de votre patrimoine. Si vous voulez favoriser l'un de vos enfants, vous pouvez le faire mais dans une mesure limitée. Vos enfants ont droit ensemble à la moitié de votre succession (par exemple : si vous avez deux enfants, ils ont chacun droit à un quart minimum). Avec l'autre moitié, vous êtes libre de faire ce que vous voulez et vous pouvez, par exemple, privilégier un enfant, par testament ou donation.
Pour faire le bilan au décès et évaluer si chacun a reçu sa part (égale ou inégale), c'est en principe la valeur au moment de la donation qui est déterminante. Mais si vous vous êtes réservé l'usufruit, la valeur des biens donnés au moment où l'usufruit s'éteint (généralement au décès du donateur) sera prise en compte. Et cela peut faire une grande différence !
Un exemple : Jef a deux fils, Jean et Marc, et possède une maison d'une valeur de 500.000 euros, un portefeuille d'une valeur de 500.000 euros et une collection d'art d'une valeur de 800.000 euros. À sa mort, Jef donne la collection d'art en pleine propriété à Jean, lui aussi collectionneur d'art. Marc n'est pas intéressé. Si Jef décède, Marc devra être indemnisé de la valeur estimée à la date de la donation (800.000 euros, indexés jusqu’à la date du décès de Jef (p. ex., 850 000 euros)). Si Jef a fait une donation à Jean avec réserve d'usufruit, la valeur de la collection d'art à la date du décès de Jef sera prise en compte (par exemple 1.000.000 euros).
Si vous transmettez plus de la moitié de votre patrimoine à une fondation privée, vos enfants peuvent réclamer leur réserve. Si le patrimoine se trouve dans une société de droit commun, il revient déjà aux enfants – fût-ce sous votre contrôle. Mais attention : parfois, le fisc estime qu'il ne s'agit plus vraiment d'une donation si vous vous réservez un contrôle excessif.
Des questions importantes qu'il est préférable d'anticiper. Parce que, malheureusement, ces détails qui peuvent sembler anodins conduisent souvent aux querelles de famille et ce probablement pas le but de la magnifique collection que vous avez constituée.
Après la donation de ses tableaux sous réserve d'usufruit, notre client a ressenti un énorme soulagement. Il avait l'esprit tranquille en sachant que ses enfants n'auraient pas à payer de droits de succession élevés, tandis que lui-même pourrait continuer à jouir de ces œuvres magnifiques au quotidien. En effet, il n’a jamais dû les décrocher de son mur.
Lies De Boever
Conseiller en planification financière KBC
Pour plus d'informations à ce sujet, vous pouvez vous adresser à votre Private banker ou Wealth manager. Ceux-ci se feront un plaisir de vous mettre en contact avec un expert en Planification financière.
Cette nouvelle ne constitue ni une recommandation d'investissement ni un conseil.