RFK Jr. pourra-t-il rendre sa santé à l'Amérique (Make America healthy again)?
En septembre, Robert F. Kennedy Jr. a rédigé un billet d’opinion dans lequel il apportait son soutien à Donald Trump, alors candidat à la présidentielle, et présentait différentes pistes pour améliorer la santé des Américains.
Il y était beaucoup question de Big Pharma et de Big Food qu’il rendait pour ainsi dire responsables de la crise sanitaire à laquelle les Américains sont confrontés. Robert F. Kennedy pointe du doigt les aliments transformés qui seraient selon lui à l’origine de l'épidémie d'obésité. Il est aussi farouchement opposé à l'utilisation des médicaments GLP-1, car il estime que changer de mode de vie est l’essence de la santé. RFK Jr. venant d'être nommé ministre de la Santé, sa politique sanitaire est donc scrutée de près.
Interdiction d'utiliser les bons alimentaires (food stamps) pour acheter des sodas ou des aliments transformés
Le Supplemental Nutrition Assistance Programme (SNAP) est un programme financé par le gouvernement fédéral, offrant des allocations mensuelles aux ménages à faible revenu afin de les aider à payer leur nourriture de base.
Certains indices montrent toutefois que le SNAP ne s’attaque pas efficacement à la problématique de l’alimentation. On constate que les ménages participant au programme consomment davantage d'aliments malsains, tels que des boissons sucrées.
Le sujet est assez sensible. D'une part, restreindre certains aliments porte atteinte à la dignité et à la liberté des ménages de faire leurs propres choix, même s'ils nuisent à leur santé. D'autre part, ce programme pourrait être davantage axé sur l'amélioration de la nutrition. Le tabac et l'alcool sont par exemple exclus du programme et personne ne conteste cette restriction.
Ce n'est pas la première initiative de ce type. L'ancien maire de New York, Michael Bloomberg, avait proposé d'interdire l'utilisation des bons alimentaires pour acheter des sodas. Sa proposition avait été rejetée par les autorités fédérales.
Force est de constater que la promotion ou l'adoption d'une telle politique prend du temps. En outre, les fabricants tenteront toujours de faire annuler ces décisions dans de longues procédures judiciaires. L’adoption d’une telle proposition a certainement un impact pour les fabricants, impact dont il est difficile d’évaluer l’ampleur.
Substances chimiques couramment utilisées dans l'alimentation et les soins de la peau
Il est de notoriété publique que les États-Unis autorisent beaucoup plus d'ingrédients dans les aliments et les cosmétiques que l'UE. À titre de comparaison, l'UE interdit l’utilisation de 1 300 ingrédients dans les produits cosmétiques, contre seulement 11 aux États-Unis. En ce qui concerne l’alimentation, l'UE dispose d'une liste de seulement 300 additifs alimentaires autorisés, alors que la situation reste floue aux États-Unis. La différence s'explique par la réglementation. Dans l'UE, la réglementation protège la société et est très directive, laissant peu de latitude aux fabricants. Aux États-Unis, la réglementation est axée sur les processus.
Il est bien entendu illégal de commercialiser un produit dangereux, mais les fabricants ont encore beaucoup de liberté pour démontrer lasécurité d'un ingrédient. Un produit ne peut pas purement et simplement être interdit. L’interdire exposerait les instances régulatrices à des poursuites. Les colorants, par exemple, sont beaucoup plus réglementés dans l'UE. RFK Jr. l’a également mentionné dans son billet d'opinion.
Si cette réglementation était appliquée aux produits américains, s'adapter ne serait pas si difficile pour les multinationales. Elles se conforment déjà à l’ensemble des réglementations régissant leurs activités dans l'UE et pourraient facilement les appliquer à leur portefeuille américain. Il est à craindre que le législateur ne doive batailler ferme pour interdire ces ingrédients un par un.
Réforme des aides agricoles
Le gouvernement fédéral subventionne depuis longtemps de nombreux produits agricoles américains. Mais la plupart des subsides sont destinés aux Big Five, les cinq grandes cultures: maïs, blé, soja, riz et coton.
Les produits frais sont en revanche très peu subventionnés: seuls 2% des aides agricoles sont allouées aux fruits et légumes. Ce déséquilibre se reflète dans l'offre alimentaire et les habitudes alimentaires des Américains. Le soja, le maïs, le blé et le riz sont produits en abondance.
Le sucre, bien qu'il ne soit pas directement subventionné, est soutenu par des quotas d'importation limités, des prêts à la commercialisation et le programme d'éthanol de sucre. Ces programmes maintiennent son prix à un niveau artificiellement élevé (environ 70% de plus que le prix mondial). Cette politique a encouragé l'industrie alimentaire à produire des aliments hautement transformés, très savoureux et à faible valeur nutritionnelle.
RFK Jr. affirme que la réforme des aides agricoles modifierait considérablement le coût des aliments transformés, riches en sucre et pauvres en nutriments, dont la production est aujourd’hui très bon marché.
Réforme des repas scolaires
Jusqu'à la semaine dernière, les lunchables, un paquet repas composé de viande bon marché hautement transformée, de fromage et de crackers, étaient indissociables des repas scolaires des enfants aux États-Unis. L’exemple parfait desaliments malsains servis aux jeunes enfants aux États-Unis. Et ce, à un âge où les habitudes alimentaires se forment et où le développement intellectuel est à son niveau optimal. Si l'on considère qu'un pourcentage élevé des enfants dépendent de ce repas à l'école pour leur dose de calories quotidienne, le problème devient encore plus grave.
Robert F. Kennedy a promis de retirer immédiatement les aliments transformés des repas scolaires. L'ex-première dame, Michelle Obama, était passionnée par la question et avait tenté de jouer de son influence, mais sans effet durable. L'idée est noble et certainement bienvenue et Robert Kennedy aurait une autorité considérable sur la FDA, l'agence de régulation. Pourtant, les experts de la politique alimentaire affirment que cette ligne sera difficile à imposer.
La vision de KBC Asset Management
Le secrétaire à la santé et aux services sociaux nouvellement élu a parlé de réformes pionnières. KBC Asset Managementestime que les chances de succès sont plus grandes si le champ d'action est limité et fait ensuite l'objet d'un suivi intensif. Ces réformes sont très lentes et la probabilité de tout réaliser en un seul mandat est quasi nulle. La stratégie d'investissement reste concentrée sur les fabricants de produits alimentaires qui sont durables, qui ont des portefeuilles de produits alimentaires plus sains et qui investissent pour apporter une réelle valeur ajoutée aux consommateurs.
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